Le dispositif vous permet de bénéficier d’une fiscalité avantageuse pour transmettre une entreprise par donation ou par succession. La loi de finances rectificative pour 2022 précise une de ses conditions.

Transmettre une entreprise à titre gratuit entraîne le versement de droits de mutation. Et ces derniers peuvent s’avérer élevés. Au point que les héritiers ou donataires sont parfois contraints de vendre pour s’en acquitter. Le Pacte Dutreil, introduit en 2003, pallie cette problématique. Il favorise la pérennité des entreprises familiales en allégeant le coût fiscal des donations ou successions, en contrepartie notamment d’engagements de conservation des titres ainsi transmis. Le pacte peut être mis en place dans le cadre de différentes stratégies patrimoniales, que la transmission soit effectuée en pleine propriété ou dans le cadre d’un démembrement.

Un abattement de 75 % sur la valeur de l’entreprise

L’intérêt de cet outil réside d’abord dans son efficacité fiscale. Lors de la transmission d’une entreprise à titre gratuit, il permet de bénéficier d’un abattement de 75% de la valeur des titres ou de l’entreprise pour le calcul des droits de mutation. En outre, il peut être cumulé avec d’autres dispositifs, comme la réduction de 50 % des droits lorsque le donateur des titres d’une société a moins de 70 ans et que la donation a lieu en pleine propriété ; ou l’abattement de 100 000 € entre parent et enfant ; ou encore l’abattement de 300 000 € en cas de donation à un salarié ou un apprenti qui prend la tête de l’entreprise.

Un dispositif qui concerne les sociétés opérationnelles

Pour bénéficier de l’allégement Dutreil, plusieurs conditions prévues par l’article 787 B du Code général des impôts (CGI) doivent être remplies. Si l’entreprise peut être française ou étrangère, il doit s’agir d’une société opérationnelle ayant une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale, et non d’une société civile immobilière par exemple. Le Pacte Dutreil est également accessible aux sociétés holdings animatrices, assimilées à des sociétés opérationnelles, qui contrôlent les filiales opérationnelles du groupe et définissent la politique de ce dernier.


Des engagements de conservation des titres

Pour profiter du dispositif, un engagement collectif de conservation des titres doit d’abord être souscrit pour une durée de deux ans par le donateur ou le défunt, pour lui et ses ayants droit, avec un ou plusieurs associés – ou depuis 2019 par le donateur seul pour lui-même et ses ayants droit. Il doit porter sur au moins 17 % des droits financiers et 34 % des droits de vote pour les sociétés non cotées (10 % et 20 % pour les sociétés cotées). À noter que cet engagement peut être réputé acquis, même sans avoir été formalisé, dès lors que ces seuils et la durée de deux ans de détention sont respectés. Il peut également être conclu post mortem, « toutefois, les conditions sont plus restrictives notamment en impliquant une reprise de la direction de la société par les donataires ou héritiers », indique Marie-Laure Decobert, ingénieur patrimonial chez Swiss Life Banque Privée.

Lors de la transmission, un engagement individuel de conservation des titres pour une durée de quatre ans doit être pris par chacun des héritiers ou donataires. Enfin, une fonction de direction doit être assurée par l’un des signataires de l’engagement collectif, des donataires ou héritiers pendant les deux ans d’engagement collectif et les trois années suivant la transmission. 


Une nouvelle jurisprudence rapidement contrecarrée par la loi

Lorsque l’une de ces conditions n’est pas respectée, l’administration fiscale peut remettre en cause le bénéfice de l’allègement Dutreil. Jusqu’à il y a peu, elle s’assurait notamment que le critère d’opérationnalité de la société transmise était vérifié pendant toute la durée des engagements de conservation des titres. La position était identique concernant l’activité d’animation des sociétés holding. Amenée à se prononcer sur le sujet, la Cour de cassation a estimé dans l’arrêt n° 19-25513 du 25 mai 2022 que la rédaction du CGI prévoyait que ces critères soient remplis à la date de transmission des titres et qu’il ne pouvait donc être exigé au-delà. « Cette position était toutefois surprenante et en contradiction avec l’esprit de la loi car cette dernière vise à encourager la pérennité des entreprises familiales en évitant des cessions dues au paiement de droits de succession ou donation trop lourds », souligne Marie-Laure Decobert.

Cette décision a donc conduit le législateur à préciser ce point dans la loi de finances rectificative pour 2022 promulguée le 17 août. Cette dernière prévoit que l’activité opérationnelle éligible doit être remplie dès la conclusion de l’engagement collectif de conservation et s’étendre jusqu’à son terme. La loi s’applique pour les transmissions réalisées à compter du 18 juillet 2022, mais vaut aussi pour les transmissions pour lesquelles des engagements de conservation étaient en cours à cette date et portant sur des sociétés n’ayant alors pas cessé d’exercer une activité opérationnelle. 

N’hésitez pas à contacter votre conseiller Swiss Life Banque Privée pour toute information complémentaire.