Retrouvez l'interview de Mary-Sol Michel, directrice de la gestion sous mandat chez Swiss Life Gestion Privée.
Dans quel contexte évoluent les marchés financiers ces dernières semaines ?
Les marchés financiers sont restés très volatils, aux États-Unis, mais aussi en Europe : après une forte baisse début mai, ils ont connu un net rebond. Ainsi, sur l’ensemble du mois, le CAC 40 ne s’est replié que de 1 %, mais cela cache une chute de près de 7 % jusqu’au 9 mai suivie d’une hausse de plus de 6 % sur la fin du mois. Au niveau macroéconomique, les perspectives de croissance ont continué d’être révisées à la baisse, en particulier en Chine et aux États-Unis. Ainsi, la croissance américaine pour 2022 n’est plus attendue qu’à 2,6 %, contre 3,2 % le mois dernier. Elle devrait se rapprocher de la croissance européenne, elle aussi légèrement révisée à la baisse à 2,6 %. En parallèle, les tensions inflationnistes demeurent un sujet majeur. Elles se sont accentuées en Europe, l’inflation passant de 7,5 % à 8,1 % en un mois, se rapprochant des niveaux américains. Si la hausse des prix reste principalement due à l’énergie et aux denrées alimentaires, l’inflation sous-jacente – qui les exclut – progresse elle aussi pour atteindre 3,8 %. La BCE n’a donc plus d’autre choix que d’agir. Elle devrait mettre fin au quantitative easing fin juin et initier la hausse de ses taux directeurs dès le mois de juillet. Quant à la Fed, elle poursuit son durcissement et devrait encore relever ses taux de l’ordre de 0,50 % en juin, comme en juillet. Ce resserrement monétaire a conduit à de sensibles hausses des taux longs et donc à une accélération de la chute des marchés obligataires. Quant à l’environnement géopolitique, il reste marqué par un enlisement de la guerre en Ukraine, doublé de nouvelles sanctions européennes avec un embargo sur le pétrole russe d’ici la fin de l’année. Seule éclaircie : la Chine est en train d’assouplir ses mesures de confinement qui touchent, depuis deux mois, 300 millions de personnes et pèsent sur 30 % du PIB local.
Les entreprises commencent-elles à souffrir de cet environnement ?
La saison des publications du premier trimestre s’achève, laissant apparaître une majorité de surprises positives, quoi que dans une moindre mesure qu’au quatrième trimestre 2021. Toutefois, les managements tiennent des discours plus prudents, en raison de leur manque de visibilité. Certes, les analystes continuent d’anticiper une progression des bénéfices de l’ordre de 10 % par rapport à 2021, mais nous considérons que
cet optimisme est assez illusoire : les tensions sur les coûts de l’énergie, des matières premières et salariaux sont autant d’éléments qui devraient peser progressivement sur les marges des entreprises, conduisant à des révisions à la baisse des prévisions de bénéfices au cours des prochains mois.
Comment avez-vous fait évoluer vos portefeuilles ?
Dans ces marchés agités, il est essentiel de rester agile. À la suite du plongeon des Bourses mi-mai, nous avons renforcé certaines positions, considérant que beaucoup de mauvaises nouvelles était dans les cours. Nous avons choisi de renforcer l’exposition au marché américain, particulièrement attaqué en ce début d’année. Nous nous sommes par exemple positionnés sur une valeur comme Microsoft qui, avec une hausse attendue des profits de 19 % cette année et une valorisation à 25 fois les bénéfices, apparaît très attractive. De même en Europe, nous nous sommes renforcés sur Airbus qui, profitant des déboires de Boeing, bénéficie d’un afflux de commandes.
Nous avons également constitué des positions sur Euroapi, une ancienne division de Sanofi cotée début mai à Paris : numéro deux mondial sur le marché des principes actifs pharmaceutiques, cette entreprise va profiter de la volonté de relocalisation en Europe de secteurs stratégiques comme la santé. Ses bénéfices sont attendus en hausse de plus de 20 % par an, tout en présentant une valorisation attractive par rapport à ses pairs. En dehors de ces achats ciblés, nous conservons un biais prudent à ce stade. Pour redevenir plus positifs, nous attendons que deux conditions soient réunies : que l’inflation se stabilise et que les analystes, prenant la mesure de la dégradation de l’environnement, commencent à réviser à la baisse leurs prévisions de bénéfices.
Article achevé de rédiger le 9 juin 2022
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