Les œuvres d’art sont des biens meubles atypiques en matière fiscale. Lors d’une cession, deux modes de taxation peuvent être appliqués, à arbitrer au cas par cas.
Les œuvres d’art sont à la fois un ensemble et la composante d’une catégorie fiscale, incluant notamment les objets de collection et d’antiquité, qui déroge au régime de droit commun des biens meubles. Elles peuvent néanmoins bénéficier des avantages de ce régime en cas de cession, sur option.
Une classification à établir en amont
« Si la notion d'œuvre d’art peut être très subjective dans son appréciation, au sens juridique et fiscal, elle est définie très objectivement », avance Elise Dibou, ingénieur patrimonial chez Swiss Life Banque Privée. Les tableaux, les peintures, les photographies d’art et les tapisseries peuvent être qualifiés d’œuvre d’art, « si ces biens respectent les critères d’éligibilité, portés par la doctrine administrative, spécifiques à chaque catégorie », précise-t-elle. Les photographies d’art, par exemple, doivent avoir été prises par l’artiste, tirées par lui ou sous son contrôle, signées et numérotées dans la limite de 30 exemplaires. « Notre rôle est de guider nos clients dans la meilleure option fiscale pour leur cession, au regard de la classification de leurs biens », ajoute Élise Dibou.
Une taxe forfaitaire applicable sur le prix de cession
Les ventes d’œuvres d’art sont assujetties, en principe, à une taxe forfaitaire de 6 %, à laquelle s’ajoute la CRDS de 0,5 %, applicable sur le prix de cession. Cependant, elle concerne uniquement les résidents français. Chaque objet est imposé séparément, sauf si la vente porte sur des objets indissociables, comme une suite de tableaux formant un triptyque par exemple. La vente est exonérée si le prix de cession ne dépasse pas 5 000 euros. « Cette limite peut inciter à scinder les opérations, mais le risque est de sortir du cadre du patrimoine privé et de voir les cessions requalifiées en activité commerciale avec un rappel d’impositions », met en garde l'ingénieur patrimonial. Les cessions au profit de musées labellisés « musée de France » ou appartenant à des collectivités territoriales sont également exonérées
L’imposition de la plus-value de cession en alternative
Le vendeur peut aussi opter pour le régime classique des plus-values de cession des biens meubles au taux de 19 %, auquel s’ajoutent 17,2 % de prélèvements sociaux, soit un taux global 36,2 % ; ce choix étant irrévocable. La plus-value, calculée par la différence entre le prix de cession et le prix d’acquisition, peut inclure les frais d’acquisition, contrairement au régime de la taxe forfaitaire qui porte exclusivement sur le prix de cession. De plus, l’application d’un abattement de 5 % au-delà de la deuxième année de détention, permet une exonération totale au bout de 22 ans. Pour en bénéficier, le vendeur doit pouvoir justifier la date et le prix d’acquisition de l'œuvre d’art «par un inventaire d’huissier, le contrat d’assurance du bien ou tout écrit prouvant son ancienneté. En cas de transmission d’une œuvre, il vaut mieux privilégier une donation notariée plutôt qu’un don manuel car la première permet de fournir une date certaine et ainsi de sécuriser la vente », détaille Manon Loshouarn, également ingénieur patrimonial chez Swiss Life Banque Privée.Dans les deux cas, le vendeur est tenu de déclarer la cession et de régler l’impôt correspondant dans les 30 jours suivants. «Si un intermédiaire participe à la transaction ou si l’acquéreur est un professionnel assujetti à la TVA, ce sont eux qui doivent effectuer la déclaration», précise néanmoins Elise Dibou.
Un choix fiscal à arbitrer selon la valeur et la durée de détention
La taxe forfaitaire, dont le taux est certes plus faible, n’est pas forcément le mode de taxation le plus avantageux. Cette taxe est en effet due quelle que soit la valeur de l'œuvre d’art lors de la cession, au-delà du seuil précité de 5 000 euros. « En présence d’une moins-value ou d’une faible plus-value, par exemple si l’œuvre a été acquise peu de temps avant la vente, ou si le cédant détient le bien depuis une longue durée, l’option pour le régime de droit commun peut s’avérer plus intéressante », résume Manon Loshouarn. D’où l’intérêt de réaliser une simulation, en se rapprochant de son banquier, avant toute cession.