Le droit de propriété réunit traditionnellement plusieurs prérogatives : le droit d’user du bien, d’en percevoir les fruits et le droit d’en disposer librement (vente, donation, voire destruction).
- L’usufruitier qui détient le droit d’usage du bien et celui d’en percevoir les revenus.
- Le nu propriétaire qui possède le droit de disposer du bien mais n’en récupère la pleine jouissance qu’au terme de l’usufruit (à durée déterminée ou viagère).
Ainsi, sauf convention contraire, ni l’usufruitier ni le nu-propriétaire ne peuvent disposer seuls de la pleine propriété.
En présence d’un démembrement de droits sociaux (parts sociales ou actions), cette répartition théorique se heurte à des considérations pratiques. Un régime a été établi à la fois par la loi et la jurisprudence fixant des règles ayant des incidences qu’il est important de cerner afin de bénéficier de tous les atouts du démembrement.
Ci-dessous, nous proposons une synthèse des règles applicables au démembrement de droits sociaux, notamment concernant les droits de vote et les droits financiers, sans aborder ici les considérations fiscales ni les charges d’imposition propres à l’usufruitier ou au nu-propriétaire.
Les droits de vote en cas de démembrement de droits sociaux
Dans les sociétés dont le capital est divisé en parts sociales, telles que les sociétés civiles (SC), les sociétés en nom collectif (SNC) et les sociétés à responsabilité limitée (SARL), le droit de vote appartient en principe au nu-propriétaire, sauf pour les décisions portant sur l’affectation des bénéfices, où le droit de vote est réservé à l’usufruitier. Cette même répartition s’applique également aux sociétés par actions simplifiées (SAS).
Dans les sociétés par actions autres que les SAS, c’est-à-dire les sociétés anonymes et les sociétés en commandite par actions, la loi prévoit que le droit de vote appartient à l’usufruitier dans les assemblées générales ordinaires et au nu-propriétaire dans les assemblées générales extraordinaires.
Dans tous les cas, il est possible de déroger dans les statuts en prévoyant une répartition du droit de vote différente, en respectant toujours une limite : le droit de vote lors des décisions concernant l’affectation des bénéfices est réservé à l’usufruitier.
Enfin, tant le nu-propriétaire que l’usufruitier doivent avoir le droit de participer aux décisions collectives, quelle que soit la répartition du droit de vote sur la décision en question. De plus, la jurisprudence a considéré dans un arrêt important de 2021 que l’usufruitier (de parts sociales au cas d’espèce) devait pouvoir provoquer une délibération des associés sur une question susceptible d’avoir une incidence directe sur son droit de jouissance.
Les droits financiers
L’usufruitier a droit aux dividendes issus du bénéfice de l’exercice qui a été distribué. En revanche, en matière de dividendes prélevés sur les réserves et de sommes assimilées, on considère que les sommes reviennent au nu-propriétaire. Cependant, le nu-propriétaire doit permettre à l’usufruitier de pouvoir exercer son droit de jouissance sur les sommes distribuées sous la forme d’un quasi-usufruit. A charge pour l’usufruitier de restituer la somme à l’expiration de l’usufruit. Dans ce cas, il est recommandé de rédiger une convention de quasi-usufruit afin de prévoir les modalités encadrant la créance de restitution.
Le démembrement est un formidable outil de transmission du patrimoine, d’autant plus lorsqu’il est combiné avec l’ingénierie sociétaire. Toutefois, il nécessite de maîtriser des règles parfois complexes. Dans la majorité des cas, une rédaction des statuts sur mesure est nécessaire afin qu’ils soient adaptés à la situation et aux objectifs, d’autant plus qu’en pratique, le démembrement des titres par donation avec réserve d’usufruit intervient souvent plusieurs années après la constitution de la société.
Avertissement : Les développements de cet article ne constituent pas une recommandation ou un conseil de la part de Swiss Life Banque Privée. Nous vous invitons à prendre attache avec vos conseils habituels (avocat, notaire etc.), afin de retenir le régime le plus adapté à vos besoins et à votre situation. Les informations transmises au sein de cet article sont susceptibles d’évoluer dans le temps. Contenu rédigé avec le département d'Ingénierie Patrimoniale.